lundi 30 juin 2008

« Un appareil aussi simple que le vent, le sable et le soleil... » (Les photos de Michel Castermans)





Photo Michel Castermans,
« Sicile, 2008 »
(Agfa Isola nuage-soleil)





J'ai échangé ce mois passé plusieurs e-mailsavec un ami bruxellois de Bernard Plossu, « son frère de coeur » (quelle belle expression !) comme il aime le nommer, et compagnon de marche (ils viennent de voyager ensemble, à pied, en Sicile).


Yannick Vigouroux :

« Bonjour,

[...] Bernard Plossu m'a fait découvrir votre travail récent en Sicile, que j'ai beaucoup apprécié. Pourriez-vous m'en dire plus ? (notamment quel boîtier vous avez utilisé ?...). J'aimerais évoquer vos photos sur mon blog consacré à Foto Povera. »


Voici sa première réponse :


« Bonsoir,


Merci de l'intérêt que vous portez à ces quelques images.

Je connais votre dynamisme (et vos publications) en la matière.


Les photos de Sicile ont été prises ave

c un Agfa "isola" nuage-soleil (5 € sur e-bay) et quelques vieux rouleaux disparates de 120 qui trainaient dans mon frigidaire...


Au plaisir de vous rencontrer (bien que je vous ai déjà vu il y a quelques années à la MEP lors d'une conférence à laquelle était présents entre autres, Serge Tisseron...)


Bien cordialement.


Michel Castermans. »






Photos Michel Castermans,
« Sicile, 2008 »
(Agfa Isola nuage-soleil)



Puis la seconde :


« Bonsoir Yannick,

Sur la suggestion de Bernard Plossu, je vous envoie également cette série de sténopés couleurs réalisés dans le Hoggar avec le petit appareil en bois de "Ruben Molina" comme celui illustré à la page 81 dans Les Pratiques pauvres. L'idée de cette série était d'utiliser un appareil aussi simple que le vent, le sable et le soleil...

Bien cordialement.

Michel Castermans (23 juin 2008). »



C'est donc bien cet appareil « Nuage-Soleil », devenu pour moi comme tant d'autres, « mythique », depuis la publication du livre éponyme (Éd. Marval, 1994), contenant un texte remarquable de Serge Tisseron et les photos de Bernard Plossu, prises avec différents appareils-jouets, qu'a utilisé Michel Castermans en Sicile...




Photo Michel Castermans,
« Hoggar »
(Sténopé Ruben Molina)



Les photos prises dans le désert avec un sténopé en bois attestent des mêmes préoccupations coloristes sans jamais, toutefois, verser dans l'esthétisme ; de la même sensibilité extrême à cette lumière tantôt méditerranéenne, dans l'extrême sud de l'Italie – et aux signes vernaculaires de l'île – tantôt spécifique au Sahara.


« L'idée de cette série était d'utiliser un appareil aussi simple que le vent, le sable et le soleil... » : cette phrase a tout particulièrement retenu mon attention. Le bois ce n'est pas du métal, c'est organique, que l'arbre soit mort ou pas. Cette attention aux éléments naturels, et la relation directe, simple, qu'on entretient avec ceux-ci, est dans ces quelques mots si bien, et de manière concise, formulée...

mardi 24 juin 2008

« La Balade de Bonaventure », un mode d'exposition « pauvre » (les photos d'Arnaud Zajac)


Photos Arnaud Zajac,
de la série « La Balade de Bonaventure »




Arnaud Zajac m'a récemment envoyé ce courrier :


« Bonjour,


je viens de passer quelques heures à visiter « Foto Povera 2» ; ça m'a donner envie de t'envoyer quelques images... elles sont je crois assez proches, dans l'esprit, de celles que tu montres... (bien que faites avec un appreil numérique). Le côté « pauvre » c'est aussi pour moi le petit format imprimé avec mon imprimante à 3 sous... » [extrait de la lettre postée le 19 mai 2008]


Voilà un aspect que je n'ai que peu abordé sur ce blog : l'économie de moyens pour laquelle optent nombre d'artistes dans le mode de présentation de leurs images: des petits tirages chromogènes ou des impressions jet d'encre simplement collés au mur (Cf. par exemple Caroll' Planque), sur le modèles des Lomowalls des Lomographes. Pas de frais d'encadrement ; pas frais de contrecollage...

Notons que fortement pixellisées, les images numériques peuvent elles aussi relever de pratiques pauvres ; par ailleurs les images d'Arnaud Zajac, avec leurs flous, leurs cadrages fluides et spontanés, souvent excentrés, évoquent parfois fortement certaines photos de Bernard Plossu...


Influence qu'il reconnait dans son second courrier, en réponse au mien :

« Je pense aussi que la Foto Povera est une question d'état d'esprit, de rapport au monde et pas une question de moyen techniques ou autres. Peut-être aussi quelques références plus ou moins conscientes en commun...

Tu me parlais de Bernard Plossu ans ma réponse par courrier] ; la découverte de ses photos dans les années 1980 a été pour moi un point de départ, à partir duquel j'ai découvert de nombreuses choses que j'ignorais, en particulier la Beat Generation...

J'avais rédigé un petit mémoire sur le travail de Bernard Plossu quand j'étais étudiant. Il m'avait beaucoup encouragé quand je lui avais montré mes photos. Ensuite, j'ai arrêté de faire des photos pendant des années...

Il y a deux ans, après la naissance de mon fils, mon regard a changé et je me suis mis à faire des images avec un appareil numérique (alors que je n'aimais pas ça du tout, moi j'étais un amoureux du beau baryté et du grain...) et peu à peu j'ai trouvé certaines images intéressantes, débarrassées de mes tics, de mes effets... (je pense qu'une bonne photo reste une bonne photo même imprimée sur du papier journal non ?). »


Je pense aussi en effet qu' « une bonne photo reste une bonne photo même imprimée sur du papier journal » ; c'est d'ailleurs ce qu'a fait Daniel Price, avec du papier recyclé, pour diffuser des photos réalisées avec des toys-cameras dans sa revue Shots. Dans chaque numéro de la revue, l'on peut vérifier qu'une bonne image conserve sa force formelle intrinsèque, même mal imprimée... A noter qu'Arnaud Zajac aime imprimer lui-même ses photos avec une imprimante basique, et relier les feuilles pour constituer des petits livrets : petit format, économie des moyens techniques... (comme à sa manière, et avec ses Polas, Clotilde Noblet...). L'on ma souvent reproché de recourir à l'appellation « photo pauvre », à tort ou à raison – je reste ouvert au débat et ne suis pas avide de consensus, au contraire, nombre de contradictions peuvent être relevées dans le mode de production, présentation, et vente des images des adeptes de la Foto Povera, et je l'assume pleinement, tant que ces « contradictions » me semblent constructives... – ce qu'ignorent ou font semblant d'ignorer les gens, de bonne fois ou non, c'est que, pour rendre viable une expo, vendre une photo ou un livre, l'on doit souvent renoncer au titre original, plus universitaire : « Foto Povera » n'est-il pas, tout comme, à un moindre degré, « Les Pratiques pauvres , du sténopé au téléphone mobile», plus « vendeur », moins hermétiques que le titre de mon mémoire de DEA d'histoire de l'art soutenu en 2000 à l'Université Paris-1 Panthéon Sorbonne (je remercie à nouveau Philippe Dagen et Michel Poivert, pour leurs conseils avisés, et l'intérêt qu'ils manifesté à l'égard de mes recherches) : « Les Pratiques archaïsantes dans la photographie contemporaine. ») ?...

Contraintes universitaires, journalistiques, artistiques et commerciales : adeptes de la « Foto Povera », ceux qui s'en revendiquent clairement, ou ceux qui se déclarent proches du concept, nous pratiquons tous des prix modérés d' « atelier » (compter - sans commission de galerie qui double alors les prix - de 80 à 2 000 euros le tirage, la moyenne étant de 200 à 400 euros).

La « Foto Povera » coûte souvent peu aux collectionneurs de photo : peut-être est-ce que pour cette raison que nous ne sommes pas pris, parfois, au sérieux, et pas achetés alors que j'ai vu nombre de gens s'enthousiasmer pour nos photos ? Le Low-Cost serait-il mal vu dans le marché de l'art ? Ce serait triste et dommageable pour le public peu aisé financièrement d'être dissuadé par ce préjugé, et dommageable, le mot n'est pas trop fort selon moi, pour l'histoire de la photo...

Mais revenons à Arnaud qui me confie par ailleurs, dans le même courrier, qu'il « préfère l'appellation "photo alternative" à "Foto Povera", cela fait penser au Rock alternatif... tout ça... un truc fait pour tout le monde... simple, indépendant, libre... Enfant, j'aimais l'idée que le Rock pouvait changer le monde...

Un autre univers important pour moi : le polar qui, comme le rock, est un genre populaire, souvent engagé... j'aime surtout les auteurs français comme Pouy, Raynal et bien d'autres... »

« Rock » et « Polar » (pour ma part, j'évoquerais aussi Manchette, Izzo, Siniac, Pelot pour les Français ; et le Belge Simenon, les Américains Himes, Ellroy...) : ce sont des goûts que nous avons en commun et que partagent, je crois, nombres d'adeptes de la « Foto Povera », ou « de pratiques archaïsantes », ou « alternatives »....

Ce « rock » qui pourrait changer le monde : c'est ce que formule, justement, Daniel Challe, dans son dernier livre, Fuga, paru aux éditions Filigrannes, déjà chroniqué ici, et dans une version plus longue et plus polémique sur : http://www.lacritique.org/article-parution-de-fuga-de-daniel-challe


Dans mon second courrier, je lui ai aussi demandé, si si certaines photos étaient faites, comme je le supposais, sans viser ?

« Oui, certaines photos sont faites sans mettre l'oeil dans le viseur... mais dire qu'elles sont faites sans viser ? Je ne crois pas... Je vise sans regarder dans le viseur, mais (ce n'est pas fréquent), je vise avec le viseur mais très vite. Je fais beaucoup de photos en conduisant ma voiture et en vélo, c'est vraiment la bonne vitesse pour voir. »

Prendre le temps de voir, en prenant son temps mais en cadrant parfois vite, de manière spontanée, et associer le mécanisme du vélo à celui des anciens appareils photo... Voilà un projet qui me plait beaucoup.

lundi 23 juin 2008

La série de Polaroïds SX-70 « Alice Raide » de Clotilde Noblet

Photo Clotilde Noblet,« Alice 01» ,
de la série « Alice Raide », 2001
(Polaroïd SX-70)




J'ai demandé à Clotilde Noblet quels étaient le contexte de réalisation, l'idée sous-jacente, l'usage très particulier qu'elle fait du rouge dans la série « Alice Raide ».

Cette série si mystérieuse me fascinait depuis plusieurs semaines mais j'ignorais pourquoi au départ.... Quelque chose résistait, m'échappait.

Bien sûr, il y a, dans cette série, ce rouge omniprésent qui aimante le regard, et parfois, dans le visage d'Alice (un pseudonyme, ce qui est cohérent : un personnage, une actrice porte rarement son vrai prénom) ce flou troublant évocateur d'états seconds...

J'ai fini par envisager cette hypothèse : et si ces Polaroïds échappaient à toute interprétation rationnelle ?... et cette couleur rouge qui unifie la série m'a rappelé le bleu satiné du film Blue Velvet (1985) de David Lynch, cinéaste qui revendique une cinéma de sensation, aux images et au récit polysémiques...

Depuis, après quelques échanges téléphoniques et d'e-mails, j'ai rencontré l'artiste en mai, dans un café de Paris, avec mon ami Pierryl Peytavi, qui m'avait incité à découvrir son travail.

La personne et ses photos se sont révélés aussi fantaisistes et attachants que le profil avenant de la jeune femme qui apparaît sur son site....

Donc, au téléphone, via Internet, puis de visu, comme à mon habitude [quel bonheur, comme critique, d'écrire sur des artistes vivants : l'on remonte à la source directe de la sensibilité, de la parole et de la vision, ... donc moins de risques de déformations fantasmatiques écrites à contresens parfois par les historiens de l'art !], je lui ai posé nombre de questions.





Photos Clotilde Noblet, «HER HOT-DOG » et «HER RAIDE-CHAIR » ,
de la série « ALICE RAIDE », 2007
(Polaroïds SX-70)



Voici, par e-mail, la réponse de l'artiste :



« Les Polaroids "Alice Raide" ont été pris à différentes époques.

Le plus ancien date de 2001 (" Alice's Vibrations " ) et le plus récent (" Alice") date de 2007.

L'idée de la série porte sur une sensation, c'est un univers clos, qui ressemblerait à une séquence cinématographique.

Les dominantes rouges accentuent le côté inquiétant et énigmatique de la série... »

« Une sensation » ; « un univers clos » (c'est aussi le cas de nombre de films de Lynch) ; « une séquence photographiques » : cette belle série aurait pu être nommée aussi « Red Velvet », tel un clin d'oeil à Blue Velvet ?




Photos Clotilde Noblet,
« ALICE'S-VIBRATIONS
», 2001
(Polaroïd SX-70)



Clotilde aime parler, à propos de son travail, de « démarche introspective », s'est reconnue lorsque je la lui ai suggéré, dans la notion d' « auto-fiction ».

Elle aime aussi réunir ses Polas dans des livrets, tels que Psychotif...

Les photos faites à New-York, des vues de ponts suspendus, ressemblent, à l'image des première photos de Walker Evans, et de nombres d'avant-gardistes des années 1920-30, à des toiles d'araignée déployées à l'infini qui « attrapent le regard », et élargissent le champ de l'imagination.

Les carnets de Clotilde sont très beaux ; nombre de cadrages sont déconcertants, sensuels, radicaux et justes !

Des oeuvres à découvrir lors de « Foto Povera off 4, journées portes ouvertes » dans l'atelier de Jean-Luc Paillé (94, bd. De Port-Royal, 75005 Paris, RER Port-Royal, du 4 au 6 octobre 2008), avec celles d'autres participants au collectif Foto Povera. A venir bientôt ici de plus amples informations sur ces journées, ainsi que sur « Foto Povera 5 » qui aura lieu en novembre 2008 à l'Opal Gallery d'Atlanta, où je viens d'exposer avec Bernard Plossu.



L'article que j'ai écrit avec Laurent Garreau sur « The Air is on Fire» (exposition des oeuvres graphiques de David Lynch à la Fondation Cartier, Paris, en 2007) est consultable sur : http://www.lacritique.org/article-the-air-is-on-fire?var_recherche=david%20lynch

Le site de Clotilde Noblet :
http://www.clotildenoblet.com

mercredi 18 juin 2008

Inauguration de l'exposition « Correspondances, Bernard Plossu & Yannick Vigouroux », par Darin Melton



Photos Darin Melton,
« Inauguration de l'exposition
"Correspondances, Bernard Plossu & Yannick Vigouroux",
The Opal Gallery, Atlanta, 31 mai 2008 »



Thanks to Darin (http://www.flickr.com/photos/devilsniff/)

lundi 16 juin 2008

Mes derniers diptyques réalisés avec un MAVICA Sony

Photos Yannick Vigouroux,
« Paris, 4 juin 2008 », de la série « Underground »
(MAVICA Sony)



Nouveau diptyque, réalisé cette fois avec mon MAVICA Sony (j'aime orthographier son nom en majuscules / capitales, pour souligner, inconsciemment au départ, la physionomie imposante de l'objet) . Lourd, volumineux et attachant boîtier stockant les images sur une disquette, conçu avant 2000, et précurseur des appareils numériques actuels...

Les gens le confondent souvent avec un camescope !....

Certes, il n'est pas comparable à une lourde chambre de format 4 x 5 inches ou 20 x 25 cm... mais sa morphologie désuette au point de paraître « massive » (il y a quelques décennies les cameras Super-8 auxquelles recouraient les amateurs étaient de la même dimension ou presque) ; le lent si long ronronnement aussi électronique qu'animal qui accompagne chacune des prises de vue, ou le visionnage d'une de ces vues, font par « excès » de présence, oublier justement cette présence...


Photo Yannick Vigouroux,
« Paris, 4 juin 2008 », de la série « Underground »
(MAVICA Sony)


Encombrant, lourd mais pratique et efficace, à sa manière, ou ma manière de voir et enregistrer le monde ?... Dommage que le Minitel d'un marron indéterminable mais efficacement déprimant , objet aliénant (dépendance aux « technologies modernes ») n'ait jamais possédé, dans les années 1980, de fonction « photo » ou « vidéo », avant l'apparition de la webcam....

Les cônes de signalisation (Digital Pinhole)


Photo Yannick Vigouroux,
« Cône de signalisation, Gare de Saint Quentin-en-Yvelines, 24 avril 2079 »
(Sténopé numérique / Digital Pinhole)



C'est juste un cône de signalisation dont le rôle est justement d'attirer l'attention du regard : délimiter une zone interdite, dangereuse...

Certains objets contemporains ressemblent à des oeuvres d'art post-modernes, des ready-made, dont le prosaïsme ne fait que renforcer la beauté.

« Cela l'étonne toujours de se surprendre penché sur les petites choses, tellement attaché aux détails. Il se rappelle les vieilles cravates qu'il a jetées il y a dix ans, la couleur d'un timbre du Congo Belge, orgueil d'une enfance philatéliste. Comme si au fond de sa mémoire il savait exactement le nombre de cigarettes qu'il a fumées dans sa vie, le goût de chacune d'elles, le moment où il les a allumées, l'endroit où il a jeté leur mégot. »

(Julio Cortázar , Les Armes secrètes, 1963)


C'est une des interrogations et type de réminiscence que je rencontre souvent, consciemment ou non, quand je photographie. Et tout particulièrement lorsque je cadre, et fais la mise au point...

Mais aussi lorsque que j'essaie – cette fois sans appareil-photo – de porter un regard différent, moins conventionnel qu'à l'habitude, sur mon environnement quotidien... J'éprouve toujours dans les deux cas, avec ou sans appareil-photo, un léger vertige, en apparence insignifiant, mais en profondeur si déstabilisant, subversif....

Photographier, est-ce inventorier les flous de nos fausses certitudes ?

vendredi 13 juin 2008

Exhibition "Plossu-Vigouroux, Correspondances", Atlanta, My 31- June 17, 2008





« "Correspondances" : ce beau titre évoque pour moi bien sûr l'amitié qui me lie avec Bernard Plossu, et qui se traduit depuis dix ans, notamment, par une abondante
"correspondance" épistolaire (échanges fréquents de courriers postaux et d'e-mails) depuis notre rencontre, mais aussi
"les correspondances "ou" équivalences", "circulations" qui existent entre nos deux travaux. "Correspondances" mais je précise que celui qui est influencé... c'est moi bien sur, pas lui ! Je suis plus jeune et beaucoup moins connu.

Bernard Plossu, avec qui je suis si heureux d'exposer, est sans doute l'un des photographes les plus importants de sa génération en Europe. Généreux, ouvert, d'un enthousiasme contagieux, il a marqué le regard de nombreux jeunes photographes, m'a encouragé comme beaucoup d'autres à faire des images, à photographier beaucoup, dans toutes les circonstances, où que l'on soit...

C'est quelqu'un qui n'a pas peur d'être plagié, imité; au contraire, il aime les échanges, l'idée que son oeuvre soit nourrie par celle des autres...et l'inverse.

J'ai parlé d'un photographe dont l'importance est de dimension européenne: elle l'est peut-être en réalité au niveau mondial. S'il est attaché à la ville portuaire de La Ciotat (la ville des Frères Lumière qui inventèrent et le cinéma et le procédé autochrome...), dans le Sud de la France, où il vit, il a aussi vécu de nombreuses années aux USA et en Espagne, et a beaucoup voyagé dans d'autres pays.

Ce photographe qui est né en Asie, au Viêt-Nam, bien que de nationalité
"française", n'est-il pas d'une certaine manière "Américain", "Espagnol" aussi ? Et pourquoi pas "portugais", tant il aime comme moi ce pays, peut-être autant d'ailleurs que l'Italie et la Belgique ?...

Le côté straight, direct, spontané de ses prises de vue, sa posture humble et fraternelle face au sujet, et le bonheur évident de photographier que reflètent ses images et ses nombreuses publications, m'ont beaucoup marqué. Bernard aime beaucoup parler des photos des autres, connus ou moins connus; souvent il me conseille de découvrir un photographe et j'en ai rencontré beaucoup grâce lui, et la plupart d'entre eux sont devenus des amis. J'ai le sentiment que nos photos ne cessent de dialoguer entre elles, au fil de nos discussions téléphoniques, de nos entrevues, de nos échanges de lettres et d'e-mails. Aucune concurrence. Mais des images qui font écho à celle de l'autre, et des autres, sans cesse. »

(Yannick Vigouroux)





Photos Constance Lewis,
exhibition "Plossu-Vigouroux, Correspondances",
Atlanta, My 31- June 17, 2008



Opal gallery is pleased to present CORRESPONDANCES : Bernard PLOSSU and Yannick VIGOUROUX an exhibition of photography. "Correspondances" refers to a friendship that has been translated over ten years by an abundant "correspondence" (frequent exchanges of letters and e-mails) between a young photographer and his mentor.


Generous, open, and with an infectious enthusiasm, Bernard Plossu has inspired countless young photographers to photograph everything fearlessly and always-- to make pictures out of the world. His straightforward and spontaneous approach to capturing and image is evident in the work of photographer and art critic Yannick Vigouroux.


Separated by a generation, these photographers have found in common the "indecisive moment" and have translated it in their own unique way with cameras that are often referred to as "primitive" in the modern world of digital technology.


For the first time ever, these two photographers exhibit their images together. The result is a visual dialogue that reminds us that photography is a continual conversation of images that echo each other, and others.


YANNICK VIGOUROUX (b. 1970). Yannick Vigouroux is an art critic, historian of photography, curator, and photographer. He has received his diploma of photography at l'Ecole Nationale du Superieure (Arles) and has published several books on photography, including La Photographie Contemporaine

(Scala, 2002) co-authored with Christian Gattinoni and Les Pratiques Pauvres: Du Stenope au telephone Mobile (Isthme, 2005) co-authored by Jean-Marie Baldner. As a photographer he uses "toy cameras" and what is often referred to as "primitive" devices to capture his subjects. In 1996 he used a brownie box camera for the series "Littoralités" in which he explored the edges of sea and port cities. In 2006 he curated the exhibition FOTO POVERA 3 with Remi Guerrin. He lives in Paris.


BERNARD PLOSSU (b.1945). French photographer Bernard Plossu was born in South Vietnam. He began to photograph in the Sahara Desert at the age of 13, and at 20 he joined a two-year ethnological expedition to Mexico. He has travelled constantly since-- working mainly in black-and- white, and treating the photograph as a means of self-reflection. He has travelled extensively in the United States; often, returning to the American West. His books Le Voyage Mexicain (1979) and Jardin de Poussière (1993) offered subjective images of empty, skeletal landscapes that resonated strongly with the post-1960s generation. He has exhibited his work internationally. In 1988 he had a major retrospective at the Centre Pompidou in Paris.


The Opal Gallery is located at:

484 B-2 Moreland Ave NE

Atlanta, GA 30307

www.theopalgallery.com

http://www.flickr.com/photos/devilsniff/sets/72157605609032806


For more information please contact:

Constance Lewis ,Director

constancelewis@gmail.com

tel. (415) 601-0281



jeudi 12 juin 2008

Absorbé par mon reflet....

Photo Yannick Vigouroux,
« Window # 912, Self-portrait, Carquebut,
Normandie, 8 juin 2008 »
(Mavica Sony)



« [...] depuis si longtemps maintenant ce sont les ombres qui me regardent. »

(Laurent Mauvignier, Ceux d'à côté, Les Editions de Minuit, 2002, p. 66)


En ce moment j'ai l'impression d'être absorbé, aspiré par ma propre image, comme si mon visage était annulé par son reflet...