mercredi 28 novembre 2007

« Trame numérique-fibre argentique » (les sténopés de Driss Aroussi )



Photo Driss Aroussi, "Marion, mars 2007"

(tél. mobile / tirage argentique 17,8 x 24 cm)

« Je fais de la photographie et j'expérimente diverses possibilités de l'image, en particulier dans ses modes de fabrication et de restitution. La multiplication des moyens de captation du visible s'est diversifiée et quantifiée. Le choix est conséquent et le résultat est surprenant autant dans la facilité d'utilisation que dans la qualité qui en résulte.

Ainsi je pousse, jusque dans ses retranchements, la fameuse black box opaque et autonome évoquée par Vilèm Flusser dans son livre Une philosophie de la photographie, en détournant le champ d'action programmé de l'appareil capteur enregistreur.

Le questionnement porte sur le flux numérique des images et la fixation sur un support papier par les moyens de la photographie classique en chambre noire.

Ces images archaïques nous renvoient aux prémisses de l'histoire de la photographie ; le tramage de l'écran ainsi sensibilisé sur du papier noir et blanc dessine des formes, des lignes, des surfaces qui produisent une épreuve singulière.

L'épreuve est très proche d'un sténopé dans la chair de l'image ; on retrouve du flou, un scintillement et peu de piqué.

Ce sont des portraits faits avec un téléphone portable et un appareil photo numérique, tout cela agrandi avec un agrandisseur fait maison. »

(Driss Aroussi)


Les portraits issus d'une hybridation aussi singulière de technique classique de tirage et de technologies nouvelles semblent naître – comme dans une bassine de révélateur – autant que s'effacer (car impossible à fixer ?). Il y a comme une palpitation dans ces trames numériques. Une douce présence flottante, entre négatif et positif, qui évoque celle du saint-Suaire de Turin par exemple. Le cadrage frontal et serré évoque bien sûr ceux des photos anthropométriques, des photos judiciaires ou des photomatons, mais l'esquisse d'un sourire et le faible contraste rappellent que l'enjeu est tout autre : il n'est pas anthropométrique mais bien anthropologique. Il s'agit, plus que jamais, par des voies nouvelles et alternatives, de faire retour vers l'humain. De réaffirmer l'irréductible force du visage humain.

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