mercredi 23 avril 2008

Entretien avec Bernard Plossu (Paris, 1999)



Photo Bernard Plossu, « Saint-Nizier, Dauphiné, 1971 » (Agfamatic),
extraite du livre Nuage Soleil, éd. Marval, 1994, p. 22




J'ai rencontré Bernard Plossu en 1999, après avoir échangé des courriers, et plusieurs discussions téléphoniques. C'est dans un café parisien que j'ai réalisé cet entretien. Sous la direction de Philippe Dagen, je rédigeais alors un mémoire de DEA d' Histoire de l'art (Université Paris-1, Panthéon-Sorbonne) sur les « Pratiques archaïsantes dans la photographie contemporaine ». J'ai en effet préféré par la suite l'expression « archaïsant » à « primitiviste »...



« Yannick Vigouroux : Peux-tu parler de ta pratique photographique, et expliquer pourquoi tu as souvent recours à des appareils amateurs ? S'agit-il d'une pratique "primitiviste" ?


Bernard Plossu : Ce qui m'intéresse en photographie, c'est d'être le plus direct et le plus juste possible, dans les situations les plus banales. J'essaie de faire des images simples (du moins en apparence, car en réalité une telle image n'est jamais simple mais au contraire très sophistiquée !). J'aime utiliser mon vieux Nikkormat équipé d'un objectif 50 mm car je peux photographier comme si j'avais en mains un Instamatic. Il n'y a rien à faire ou presque, sinon le minimum : dans la journée, je règle la vitesse au 1/1000 s, et le soir au 1/30 s.


YV : C'est un appareil télémétrique ?


BP : Non, réflex. C'est un boîtier Nikon qui date d'il y a une vingtaine ou une trentaine d'années, qui est en acier, donc très costaud. Il y a longtemps que mes boîtiers n'ont plus de cellule pour mesurer la lumière. En fait, cette cellule est dans ma tête. Ainsi, je suis toujours prêt à agir très vite, comme je le ferais avec un Instamatic. Ce qui me plaisait au départ dans l'Instamatic, c'est que l'appareil est plus rapide que la pensée. Je n'ai pas le temps de réfléchir et peux déclencher tout de suite. Pour cette raison, les appareils bon marché m'intéressent tous : le Prestinox panoramique à 90 Francs, l'Agfamatic "nuage/soleil", l'Instamatic Kodak... Ce qui compte, c'est le résultat. Que j'utilise un petit Instamatic ou mon Nikkormat, ce que je recherche c'est la spontanéité. Je peux photographier vite. Mais cette rapidité très "française", qui renvoie à l'"instant décisif" de Henri Cartier-Bresson, je l'utilise au contraire pour enregistrer des instants "non décisifs". Si ce sont des instants photographiés très nerveusement, il ne s'agit pas de fixer précisément le saut d'un homme sur une flaque d'eau, mais par exemple un morceau de lumière sur un mur avec une fenêtre, ou du vide...


J'aime bien l'expression que tu utilises dans la lettre que tu m'as envoyé, "mise en boîte du réel", qui m'incite à présent à faire une "mise en boîte", une moquerie sur cette croyance si répandue que l'on fait de bonnes photos parce qu'on a un bon appareil. Je n'y crois pas du tout. Quand je vois un individu équipé de gros téléobjectifs, je suis sûr que c'est un amateur. Alors qu'il est possible de faire de bonnes photos avec un appareil à 50 Francs, ce qui montre bien que c'est le contenu de l'image qui est important, pas l'appareil...



Photos Bernard Plossu,
« En sortant de Berkeley, Californie, 1980 »
(Agfamatic),
extraites du livre Nuage Soleil, éd. Marval, 1994, p. 36-37



Cela dit, ce n'est pas parce que les photos sont un peu floues, imparfaites, qu'elles sont "primitives". Je crois qu'elles sont sophistiquées, même si elles déroutent les gens qui ne sont pas habitués à la photo. Pourquoi la photographie grand public, bien nette, faite avec des téléobjectifs, a t-elle autant de succès ? C'est parce que cela permet aux gens de régler la netteté de leur vie, dans les photos de fleurs, d'enfants et de paysages, ce que l'on appelle habituellement de "belles photos". Le bonheur en réglant ce bel appareil si cher, c'est de régler tout, la vie entière. C'est autre chose qui nous intéresse, toi et moi. Il ne s'agit pas d'une "anti-netteté", je crois que c'est plutôt une appréhension plus "ludique", pour employer un terme à la mode que je n'aime guère. C'est une "mise en boîte" de la photographie en général que de faire des images avec de tels appareils...


YV : Si un photographe "professionnel" utilise un appareil-jouet ou amateur, c'est donc aussi pour se prendre moins au sérieux ?


BP : Oui. Mais il faut faire attention à la "bonne photo ratée-réussie" : certains font des bons Polaroïds, en noir et blanc, de grand format ; ils font en sorte que tous les bords soient flous, comme s'il y avait des cheveux, pour que cela ressemble aux images de Robert Frank. Leurs photos deviennent "bonnes", mais si l'on pose un cadre blanc pour enlever tout cela, il n'y a plus rien. Cela me fait penser aux trop belles Marie-Louise, il faut se méfier des trop gros effets esthétiques.


YV : Utiliser ce type d'appareil, n'est-ce pas laisser entrer plus de hasard dans le cadre ?


BP : Ce n'est pas du hasard. Je vise ; je ne fais pas une photo en levant le bras en l'air et en me disant : je vais faire une photo artistique ! J'aime bien, pour plaisanter, dire que les photographes rencontrent le hasard qu'ils cherchent. Il nous arrive des choses qui n'arrivent qu'aux gens qui regardent. Certes, quelquefois, il y a des hasards extraordinaires, mais ce n'est pas si simple. Je crois qu'il ne peut jamais s'agir seulement de hasard...


YV : L'emprise sur le réel est-elle moins forte avec ces appareils, même si le photographe cherche un rapport plus direct avec celui-ci ? C'est en tout cas ce que je ressens face à tes images...


BP : Tu crois ? Je ne sais pas. C'est tellement rapide, cet instant de la prise de vue, que ce soit avec un Nikkormat au 1/1OOO s ou un Instamatic! Évidemment, c'est différent avec un paysage. Quand j'ai un panoramique dans les mains, à Saint Guilhem le désert, je m'arrête et je cadre. C'est de la photo "bien vue".


YV : Je trouve que les flous, les imperfections et le grain donnent à tes images une dimension onirique, qui renforce paradoxalement l'"effet de réalité"...


BP : Il y a du grain parce que les films en donnent. Il y a aussi du gris parce qu'il n'est possible désormais d'utiliser que des films couleur pour les Instamatics, qui seront tirés en noir et blanc. Il y a des zones de lumière lorsque j'utilise un appareil de première communion à 5O Francs, acheté dans le Tabac de la rue du village andalou où nous habitions. Je met un film 24 x 36 cm et la lumière rentre parce qu'il n'est pas parfaitement hermétique... Il faut savoir jouer de tout cela de manière à obtenir des photos intéressantes, mais il faut en jouer sans que cela ne devienne un "truc". La raison pour laquelle j'utilise un 50 mm en photographie est bien résumée par cette phrase de Gauguin : "Les effets ça fait bien, ça fait de l'effet." Je me méfie beaucoup des effets. Il est très rare qu'il y ait des fioritures dans mes photos. Avec mes Instamatics, je pourrais laisser des détails autour de l'image. Peu de photos sont dans ce cas, bien qu'il y en ait quelques unes dans le livre Les années d'Ameria (Los anos almerienses), faites avec des appareils-jouets. Par exemple, sur une page, deux vues sont juxtaposées : la première, la 23, ratée, est toute blanche, la 24 montre un palmier. Je trouve que la première image conduit joliment le regard vers la seconde. Dans les triptyques, il y a aussi parfois des numéros pour montrer la progression des vues, mais je ne les laisse pas toujours... Dans la photo montrant Manuela qui suce son pousse, j'ai laissé le numéro "1" et "Agfa" car justement j'ai utilisé un Agfamatic.


YV : En fait, ce qui est pour moi un grand bonheur, c'est la réflexion sur le format des images. Ainsi, dans le livre, les panoramiques de paysages imprimés en tout petit sur la page donnent envie de rentrer dedans, comme c'est souvent le cas avec les miniatures...

On a aussi l'impression d'être très près du format du négatif...


BP : Oui, c'est le contraire du grandiloquent.


YV : Cette question du format est importante. Chez des photographes comme Éric Dessert ou Rémi Guerrin par exemple, qui utilisent beaucoup le 4x5 inches, le fait que le format du tirage soit identique ou presque identique à celui du négatif relie beaucoup plus fortement celui-ci au moment et à l'acte de la prise de vue.


BP : En effet, cela relie plus le tirage à la prise de vue. Mais chez moi, ce n'est pas systématique. La taille du tirage est variable au sein d'une même série, pour des négatifs identiques. Je la détermine à la lecture de la planche contact, au moment de la sélection. Certains de mes tirages sont très petits, d'autres très grands... On a essayé, par exemple, de tirer la photo de la couverture de Nuage / Soleil en très grand, 1 x 1 cm, pour les expositions au Centre de Photographie de Lectoure et à Madrid, et le résultat était magnifique. En revanche, d'autres images reproduites dans le livre ont été exposées dans un très petit format. Souvent, dans une même série, j'imagine une image tirée dans un très grand format, et une autre dans un très petit format... Ce n'est pas un parti pris que je conseille, il s'agit seulement d'un choix très personnel auquel l'auteur doit réfléchir.


YV : A présent, j'aimerais que tu m'expliques pourquoi tu préfères parler dans ton courrier de "primitivismes" plutôt que de "primitivisme" ?


BP : Il me semble qu'il ne s'agit pas d'un courant homogène, mais qu'au contraire, ce terme recouvre une grande diversité de pratiques et de préoccupations, différentes sinon parfois carrément opposées. Le point commun de toutes ces pratiques serait toutefois l'utilisation de boîtiers "primitifs", à la fois anciens et rudimentaires, ou des boîtiers bon marché d'aujourd'hui...


YV : Je crois que dans tous les cas, la clef du plaisir que procure un tel boîtier, c'est de pouvoir faire des images tel que l'on a besoin d'en faire. Il est évident que les gens qui font des sténopés, de l'Instamatic ou du Diana, éprouvent un grand bonheur dans le jeu qui consiste à utiliser ces appareils. Je pense surtout aux photographes de l'école américaine influencés par les travaux de Nancy Rexroth au début des années 1970. Ils s'amusent en créant énormément. C'est presque une école du bonheur... D'ailleurs, Daniel Price a trouvé tellement de belles images faites au Diana qu'il a créé une revue imprimée sur papier recyclé, intitulée Shots, dans laquelle il a publié énormément de photos faites ainsi par de jeunes américains. Il a ainsi redonné un second souffle à l'école des suiveurs de Nancy Rexroth...


BP : Le seul problème, avec ce type de pratique, c'est que l'on a l'impression que tout le monde, un Diana en mains, fait de bonnes photos. Il est assez facile de faire ainsi de fausses "bonnes photos ratées" et il est important de distinguer ceux qui les font vraiment, sincèrement, et ceux qui les font seulement pour plaire, pour être dans un "créneau". Enfin, ce n'est pas si grave que cela devienne une mode! Pourquoi pas, si cela fait plaisir à tout le monde ? Après tout, il n' y a aucun mal à s'amuser...


YV : Tes images faites avec ces appareils bon marché sont-elles différentes de celles faites avec des appareils plus conventionnels, ou y a t-il une continuité ?


BP : C'est une continuité. D'ailleurs, je disais tout à l'heure que je photographie avec mon Nikkormat comme si je photographiais avec un Instamatic. L'avantage du Nikkormat, c'est le rectangle 24 x 36 cm. Même si j'utilise aussi le format carré et le panoramique, cela reste mon format préféré. L'autre avantage, c'est que lorsque la lumière décline, je peux continuer à faire des photos, alors que c'est impossible avec des petits appareils bon marché. En fait, je pourrais les utiliser, mais je ne veux pas utiliser de flash. Dans les deux cas, le principe de vision est le même : je cherche ce côté "en prise réelle" avec la vie, très direct.


Pour revenir au Nikkormat utilisé comme un Instamatic, j'aimerais raconter une anecdote. Un jour, j'étais avec Pierre Devin chez Marc Trivier. Assis sur une table, ce dernier avait posé sa boîte à côté de lui. Je l'ai prise et j'ai vu son visage dans le viseur. Comme j'avais mon Nikkormat dans l'autre main, je lui ai dit : "Ne bouge pas Marc ..." et je l'ai photographié dans sa boîte. Ce qui est intéressant, ce n'est pas que ce soit un portrait de Marc Trivier ou une de mes photos, mais qu'on le voit dans son appareil, rephotographié par moi. Je trouve que c'est un joli jeu.


YV : C'est ce que je nommerais "de la mise en boîte à la mise en abîme"...


BP : Oui, c'est cela.. Et c'est la raison pour laquelle la photo a été reproduite à la fin du livre de Denis Roche, Le Boîtier de mélancolie 1.


Cette anecdote me fait aussi penser à des images que j'ai tournées il y a deux ans avec une caméra 8 mm, pendant un voyage en train entre La Ciotat et Lyon2. Au départ j'ai filmé, j'ai fait des photos aussi, et puis à un moment donné je me suis amusé avec les deux appareils. C'est-à-dire que j'ai placé le viseur de la caméra derrière le viseur du Nikkormat, et j'ai ainsi filmé dans le train, en 8 mm, dans le Nikkormat. Le résultat est très joli, très intéressant. Récemment, j'ai retrouvé 8 bobines tournées en 8, de quinze à vingt ans. Je ne les ai toujours pas visionnées. Il y a tout le Voyage mexicain en film... Je ne voulais pas alors être photographe, mais cinéaste... Avec le film tourné entre La Ciotat et Lyon, je crois qu'il y a quelque chose de bien à faire, c'est d'en tirer des photogrammes...3 »


(Bernard Plossu, entretien avec Yannick Vigouroux, Paris, 7 octobre 1999)




1 A propos de cette photographie, Denis Roche écrit : "Mon livre s'achève, j'ai devant moi la dernière photo que j'ai choisi d'y mettre. Je voulais qu'elle dise l'étrange instant où l'image se referme, où l'on se dit, où je me dis, que c'en est fini de l'ouverture et du chemin, des phrases qui tournent comme des bobines de fil, de la montée et la descente infinies des sensations, d'une mélodie heureuse dans une brise hors de portée [...] Je voulais que cette photo soit prise dans la porte qu'on referme, qu'elle soit le rai de lumière qui se fait angle aigu. Je voulais qu'elle soit petite, rétrécie comme un regard à demi fermé, qu'elle biaise avec la vérité, qu'elle la prenne par le travers, qu'elle soit à peine penchée sur elle [...]" Denis Roche, Le Boîtier de mélancolie, la photographie en 100 photographies, Paris, Hazan, 1999, p. 208.

2Le film Sur la voie de Hedi Tahar et Bertrand Priour, produit par les films Houppe, 1997.

3 Le livre a été depuis publié : Bernard Plossu, Alain Reinaudo, Train de lumière, Crisnée, Editions Yellow Now, 2000.

mardi 22 avril 2008

« Un langage ordinaire »

Photo Yannick Vigouroux,
« Paris, 2000 » (Lomo LC-A)


« Et il insistait encore [le professeur de R. Carver, John Gardner, animant des ateliers d'écriture] et encore sur la nécessité d'employer un langage ordinaire (je ne vois pas comment le nommer autrement), la langue la plus courante, celle dans laquelle nous parlons tous jours. »

(Raymond Carver, Les Feux, du recueil éponyme de textes, 1984)


« Celle que nous parlons tous les jours », mais à quelle époque, dans quel contexte socio-professionnel, où et quand ?...

« Je n'ai pas un langage pour les dimanches » avais-je lu lycéen dans une exposition consacrée au poète contemporain Gérard le Gouic. Cette phrase est restée gravée dans ma mémoire.


Photo Yannick Vigouroux,
« Paris, nov. 2002 » (Nikon Af-600)


Voilà ce que j'aime en littérature, que j'ai retrouvé chez des auteurs de ma génération tels que Chuck Palahniuk (http://www.chuckpalahniuk.net/) aux États-Unis, qui a comme Carver suivi des cours d'écriture (qui font trop souvent défaut en France !) ; c'est aussi ce que j'aime en photo dans les images si straight et sans apprêt, « brutes » à leur manière, de Walker Evans, Robert Frank et Bernard Plossu, pour ne citer qu'eux, et bien sûr Saul Leiter que je viens de découvrir, exposé récemment à la Fondation Henri Cartier Bresson (Cf. le catalogue d'exposition et le Photo Poche n° 113, éd. Actes Sud, qui lui consacré et que je consulte presque tous les jours depuis deux mois...).

lundi 21 avril 2008

« Autoportrait : 6 x 9 Box Camera » de Marc CC

Photo Marc CC,
« Autoportrait : 6 x 9 Box Camera »



J'ai proposé à Marc CC d'écrire ici sur sa photo prise d'une fenêtre ; j'aime en effet beaucoup cette vue plongeante et cette main floue, si doucement irréelle, qui semble effleurer délicatement la rambarde sans s'y poser, et désigne ou ouvre une perspective illimité (celle de l'imaginaire ?). Une image simple et directe, d'une grande force, efficacité formelle.

Je l'ai souligné plusieurs fois, le motif de la fenêtre a tellement été « travaillé » par les peintres et les photographes qu'il pourrait être usé jusqu'à la corde.

Or, en découvrant sur Internet une telle image, et, parfois, en prenant mes propres photos, je me dis une fois de plus, que décidément, il n'en est rien : ce sont souvent les thèmes et les motifs qui furent les plus explorés qui méritent que l'on s'y affronte.

C'est une gageure (risque de redite, de citation trop littérale de ce qui fut fait par la passé). Et dans mon cas, cela peut prendre un caractère quasi-obsessionnel que je revendique et qui n'aura échappé à personne...

Nous avons donc évoqué ensemble le sujet :



« Marc CC :

Bonjour,

ravi que la photo vous plaise, elle évoque beaucoup de choses pour moi.

Marc (14 avril 2008). »


« Yannick Vigouroux :


Oui cette image en effet me plait beaucoup... Vous savez que non seulement je travaille beaucoup, depuis environ un an, sur le motif de la fenêtre, mais que je suis l'un des co-fondateurs de la Foto Povera...


à bientôt donc,

bonne journée

(15 avril 2008) »


« M CC :


J'aime votre démarche qui est celle de donner la parole aux photographes...


En ce qui me concerne, je n'ai jamais vraiment aimé commenter mon travail... Lorsque j'écris, que je compose de la musique ou lorsque je prend des photos, j'ai une très grande retenue à présenter mon travail, ce n'est pas une question d'insatisfaction, de travail bâclé, mais de pudeur.


Lorsque l'étape de la présentation est franchie, vient celle de l'explication. Donner un sens à une photo c'est comme voler au spectateur une part de rêve et d'imagination, le mystère est en parti dévoilé. J'aime prendre une œuvre comme elle vient, sans aprioris, me créer tout un univers autour d'elle.


Ce que je peux dire sur cette photo, c'est que le temps ciel était triste, je savais qu'il me restait encore quelques photos à prendre avec mon Goldy, je le voyais sur l'appui de fenêtre et il narguait . Poursuivre mon explication serait déjà trop entrer dans le détail...


J'ai parcouru vos blog j'ai regardé "Hommage à Daniel Boudinet" et j'ai beaucoup aimé les couleurs, encore une fois, je ne veux pas trop en dire, mettre des mots sur des sentiments ce n'est pas chose aisée !


Après avoir regardé vos photos de fenêtres, j'ai eu une soudaine envie de les photographier ! Les fenêtres où l'on distingue à peine l'intérieur de la maison...où l'on sent soit une chaleur intense ou une ambiance glaciale due à l'éclairage des néons.


Pour finir, je pense que le titre seul doit donner une piste au spectateur, le reste est superflu ( lorsqu'il s'agit de simples photos comme la mienne ) .


A bientôt,


Marc (16 avril) »


« YV : Bonjour Marc,

merci pour ces précisions (en fait, vous savez, je trouve que vous en parlez bien et de manière sensible de vos photos...) ; outre quelques lignes de ma main, j'aimerais publier cet échange épistolaire, pour les raisons évoquées au début de cette phrase, dans quelques jours... »

Dites-moi s'il vous plait si vous êtes d'accord ?

A bientôt,

Yannick (17 avril) »


« Marc CC


Bonjour,


j'aurais envie de dire : 100 % OK »


Voilà les e-mails échangés ces derniers jours avec Marc.


S'est mise en place très naturellement, avec je crois spontanéité, l'une de ces correspondances, au sens épistolaire du terme, et dans sa nouvelle forme électronique, entre deux photographes, auxquelles je tiens tant.


Mais c'est une double correspondance, puisqu' il s'agit aussi de « correspondances », « circulations » entre nos deux regards, sensibilités, entre des artistes qui utilisent les mêmes boîtiers archaïques (des box 6x9).


Notons que l'image s'intitule simplement « Autoportrait », indication accompagnée de la catégorie d'appareil utilisée. Nulle mention de lieu ou de date. C'est sur un espace extérieur que s'ouvre cet autoportrait sans visage, ce dernier étant remplacé par la main considérée comme l'ultime prolongement, terminaison du regard (l'autre, la droite, déclenche) : un parti pris peu conventionnel, me semble-t-il...

vendredi 18 avril 2008

Un lent travelling photographique (une photo prise à Naples par Pierryl Peytavi)

Photo Pierryl Peytavi,
« Naples, 2006 »
(Brownie Flash)


Voici l'un des ces « théâtres d'ombre et de lumière » photographiques, déjà évoqués à propos de mes photographies prises justement près de Naples, dans les ruines de Pompéi, en 2003.

L'image est presque monochromatique. Seules quelques pâles traces de couleur, orangées et bleutées, affleurent dans ce théâtre sombre, ou ce décor en mouvement, dans le flou de bougé.

Une fenêtre encore, celle d'un bus.

Cela ressemble à un lent travelling photographique.

mardi 15 avril 2008

L'influence du « Plongeur » de Buno Réquillart sur mes « Littoralités »


Photos Yannick Vigouroux,
des séries « Littoralités » et
« My Magic Box » (box 6x9)



La découverte du « Plongeur » (1974) de Bruno Réquillart, lors de ma scolarité à l'ENSP d'Arles au début dès années 1990, à l'occasion d'un cours d'Arnaud Claass sur l'histoire de la photo, bien avant que je devienne responsable de sa donation fin 1994 au sein de la Mission du Patrimoine photographique (Ministère de Culture France : désormais les tirages sont visibles sur le site de la Médiathèque de l'Architecture et du Patrimoine pour laquelle je travaille désormais : http://www.mediatheque-patrimoine.culture.gouv.fr/fr/archives_photo/index.html), ma considérablement marqué.


Je sais que certains photographes, comme on me l'a parfois confié, se sentent inhibés face au foisonnement des images des autres quand ils travaillent sur celles-ci (conservation, inventaire, diffusion, exposition etc.), et complexés face au talent de ces auteurs...


Ce n'est pas mon cas, même si je l'ai craint au départ : « Suis-je aussi bon qu'eux ?... » Je ne me pose jamais la question. Je produit mes images, c'est tout et celles que je juge dignes de l'être, je tente de les rendre publiques...


Donc, comme je l'avais déjà écrit ici, Bruno Réquillart m'a donc énormément influencé (CF. http://fotopovera.blogspot.com/2008/03/linfluence-de-bruno-rquillart-sur-mes.html).


Le Plongeur est un instantané d'une grande audace formelle, structuré de manière très rigoureuse (à tel point qu'il ressemble à un collage), et a laissé des traces évidentes dans ma manière de cadrer. Surtout lorsque je « coupe » en deux l'image, et comme en attestent ces quatre photos des séries « Littoralités » et « My magic Box », qui ont toutes été prises avec une box 6 x 9.

jeudi 10 avril 2008

A propos d'un diptyque (photos de rue au Lomo LC-A)


Photos Yannick Vigouroux,
« Paris, 2000 », de la série « Fascination Street
(Diptyque / Lomo LC-A)


Deux scènes de rue « siamoises », en apparence une seule et même image, avec au centre, manteau sombre d'une personne photographiée de dos, que j'aurais décidé de couper en deux pour créer un blanc, un silence visuel.


En réalité, il n'en est rien puisqu'il s'agit de deux prises de vues distinctes que j'ai décidé de rapprocher pour qu'elles dialoguent entre elles. Pour l'anecdote j'avais au départ placée celle de gauche à droite et inversement, Christophe a eu l'idée pertinente de faire le contraire.


Voilà la genèse du diptyque, qui n'est pas, dans son élaboration, ce qu'il semble être au final.


Comme je l'ai souvent fait, j'ai dans les deux cas déclenché sans viser, à bout de bras,avec une légère contre-plongé, l'appareil-photo constituant la terminaison nerveuse de mon bras tendu comme le serait un câble d'acier, et du reste de mon corps – et pas seulement de mon regard.




PS : très critique parfois dans mes écrits à l'égard de la « Lomographie », phénomène de mode souvent, démarche atypique et sincère parfois - je n'ai pas changé d'avis mais le phénomène prenant de l'ampleur, de vrais talents se sont emparés du programme minimaliste : « Don't think. Just shoot! » -, je recommande aux lecteurs de découvrir, entre autres, les images de Catherine Merdy :


http://catherine.merdy.free.fr/

mardi 8 avril 2008

« Fragments quotidiens » (série de Polaroïds 600 noir et blanc)

Photos Yannick Vigouroux,
« Anne-marie, Paris, 1999 »,
de la série « Fragments quotidiens »
( 4 Polaroïds 600 noir et blanc)



Longtemps, au début des années 1990, alors que j'étais encore étudiant à l'ENSP d'Arles, j'ai rêvé d'un film Polaroïd amateur en noir et blanc, qui apparut finalement durant cette décennie, et disparut, à ma connaissance, très vite.


Un minuscule carré rempli de noirs froids, aux profondeurs bleutées, brillantes lisses et insondables.


Pendant de nombreuses années de ma vie, j'ai eu le sentiment de ne pouvoir écrire, mais aussi « écrire avec la lumière » (faire des photos) que des choses courtes, qui ne me prennent que peu de temps, et ne me coûtent que peu d'argent. Comme le confie le novelliste américain Raymond Carver dans Les Feux.


Faire des Polaroïds, c'était pour moi comme écrire une nouvelles de 2, 3 ou 4 ou 6 pages maximum. Et non élaborer une série composée de nombreux tirages de grand format, difficile à transporter, financer etc. Des micro-fictions intimes. Simples, dépouillées formellement, et efficaces.


Le film était certes coûteux (en apparence). Mais, dans l'investissement non déraisonnable de départ, pouvait très vite et facilement se suffire à lui-même, monté dans son châssis ou directement fixé au mur lors d'une exposition, comme ce fut tant l'usage dans les années 1980.


Cela explique, entre autres, ma prédilection pour le Polaroïd, avant la salutaire apparition du numérique : je pouvais faire des images sans posséder l'espace du laboratoire, sans boîtier coûteux ; à l' « arrachée », à la « va comme je te pousse », prenant peu de place, faciles à stocker pour un « nomade » (malgré lui). Je ne cessais en effet de déménager mes affaires de Vincennes où j'accomplissais mon Service national en tant que photographe, le logement exigu d'un ami qui m'hébergeait ponctuellement dans son logement exigu du XVIIIe arr. de Paris, puis la chambre de bonne encore plus exigüe que j'occupais par la suite dans le XIIIe arr. Accumuler des Polaroïds qui tenaient dans les petites boîtes d'emballages de leurs châssis était bien pratique.


Est née, de ces circonstances notamment , et de ce parti pris d'économie de moyens et d'espace, la série « Fragments intimes », cette fois dans le XIIe arr. Et avec la complicité d'Anne-Marie.


Cette série recourt souvent, mais pas exclusivement, au film Polaroïd 600 noir et blanc, et au principe, mais pas exclusivement non plus, du polyptyque, qui ancre d'emblée les images, que le déroulement soit ou non séquentiel (comme au cinéma ou dans la bande-dessinée), dans une logique narrative, du fait de la « contamination positive » qu'elles entrainent entre elles...


Tels que je les ai pensés dans leur agencement, et à cause des angles de prises de vue déformants souvent adoptés (plongées et contre-plongées etc.), les polyptyques rendent compte du quotidien sous la forme de diverses aberrations perspectivistes, introduisant dans les situations ordinaires une atmosphère que j'espère fortement onirique.


J'ai eu récemment recourt à nouveau à la même logique, désormais avec un appareil numérique, pour réaliser les diptyques des « Amoureux du métro parisien » (http://fotopovera.blogspot.com/2008/03/les-amoureux-du-mtro-parisien-est-ce-de.html) et l'autre diptyque publié dans l'autre blog (http://yvigouroux.blogspot.com/2008/04/plaidoyer-pour-le-mtro-doris-lessing.html).

lundi 7 avril 2008

« In the Eye of the Beholder » (Beauty is) de Julie Vola

Photo Julie Vola,
de la série « In the Eye of the Beholder (Beauty is) »

(Holga)


Se référant explicitement à la belle introduction de Nuage / Soleil du photographe Bernard Plossu (éditions Marval, 1994), rédigée par le psychanalyste Serge Tisseron, qui oppose notamment l' « image sensationnelle » si prisée par l'amateur, à l' « image-sensation » prisée par la majorité des acteurs de la Foto Povera, Julie Vola déclare :


« Il y a quelque chose de l'ordre de l'évocation, comme un souvenir vague mais familier, une sensation d'être, dans la conscience d'une connaissance indicible.


Ma perception de l'image que notre société donne aujourd'hui du paysage est celle d'un espace grandiose, net et précis et presque intouchable, c'est une façon de l'objectiver, d'être "devant" le monde, j'essaye avec mes images de trouver le moyen d'être "dans"de, de créer des images qui sont le prolongement du sentiment de participation au monde, "ce moment de joie et d'émotion intense qu'accompagne la sensation fugitive de beauté ou de transparence du monde." »


Ce sentiment « fugitif de beauté ou de transparence », se caractérise formellement dans les photos de Julie Volta par le côté à la fois figé et fluide de l'enregistrement ; la scène est nette, mais du fait de la qualité médiocre de l'optique en plastique, elle ne l'est que partiellement, car le centre est généralement plus « piqué » que le » reste de l'image dont la précision se dilue progressivement dans le vignettage des bords du carré.


Des caractéristiques que l'on retrouve notamment dans les photos prises avec un semblable appareil-jouet, par Olivier Péridy, Didier Cholodnicki et Daniel Challe qui vient de publier un nouveau livre, évoquer dans mon texte précédent, Fuga, aux éditions Filigrannes.


http://www.julievola.com

Parution de « Fuga » de Daniel Challe (éditions Filigranes)

Photo Daniel Challe,
« Marilyne, Mané Braz, Bretagne, 2005 »
(Diana / Couverture du livre)


Daniel Challe, qui vient de m'envoyer son très beau livre Fuga, m'écrit très justement :

« Je savais que tu serais un des regardeurs/lecteurs les plus attentifs de cet ouvrage qui fait suite au dernier volet du cercle (La caméra-jouet) et explore maintenant le monde dans un cercle plus lointain que mes territoires proches. »

Une passion commune nous lie pour ces appareils de poche, ces appareils bricolés qui sont "nos petites machines à poésie" (l'expression est de Nancy Rexroth, NDLA) et peut-être aussi nos petites machines de résistance face au triste monde qu'on nous offre et qu'on nous promet......C'est aussi le sens du texte qui accompagne Fuga, qui revendique sans doute la poursuite d'une certaine révolte adolescente que le Rock a parfois exalté.... »


Photos Daniel Challe,
« Gladys, Rome, Italie, 2006 / Naples, Italie, 2006 »
(Diana)


Des « machines à poésie » qui seraient aussi des « machines de résistance » : je partage entièrement ce point de vue.

Remarquablement imprimé et mis en page sobrement (quelques variations infimes de formats, de temps en temps des pages blanches comme des silences musicaux, des respirations), le livre propose une belle succession d'images carrées intimistes prises récemment, depuis 2005, dans le cadre du quotidien ou de voyages, à Naples (2006), ou, encore plus récemment, en Inde (2007).


Photo Daniel Challe,
« Gladys, Seynod, Haute-Savoie, 2006 » (Diana)


L'une d'entre elles montre les mains d'une fillette qui dirige une bougie allumée vers une cabane à oiseaux qui ressemble beaucoup à un sténopé ; la flamme évoque autant le bec jaune d'un volatile que ce soleil qui permet d' « écrire avec la lumière ». L'image revendique, comme beaucoup d'autres, l'ancrage du regard dans l'imaginaire de l'enfance.

J'ai beaucoup aimé aussi le texte du photographe qui conclut l'ouvrage, rédigé dans un style aussi direct, simple et fluide, sans « effet », que ses images. Ce texte évoque une influence que je revendique depuis toujours, systématiquement éludée par les histoires de la photographie : celle d'une certaine musique rock, punk et Cold-Wave milieu des années 1970 ainsi que celui des années 1980, ainsi que, visuellement, leurs pochettes (celles de Joy Division, de The Cure : les visages rougeoyants et flouttés des membres du groupes sur la pochette Pornography (1982) par exemple ; en général toutes les pochettes et les livrets du Label 4AD qui publia, notamment les Cocteau Twins, Dead Can Dance, les Pixies aussi... CF. http://www.4ad.com/). J'ai récemment parlé de cela dans le contexte d'interventions autour de mon livre Naufragée (éd. Thierry Magnier, 2007) dans un entretien (http://www.ville-villepinte.fr/t_zoom.php3?id_rubrique=1669)


Daniel écrit ainsi, à la fin du livre (« La Physique du monde ») :

« L'attraction de cette énergie Rock'n Roll

qui me chavire en ces années 70 est noire et blanche


Les images découpent le son

comme le Leica de Robert Frank

découpe la rue et les visages

[...]

Sur les pochettes des disques

les photographies devinrent floues

évanescentes. »


Certes, cette musique est comparée à la façon de cadrer de Robert Frank, qui a tant influencé les acteurs de la Foto Povera, mais l'influence de la musique et des visuels des pochettes de disques a souvent précédé la découverte des oeuvres de photographes...

Fuga de Daniel Challe (photographies et textes), 165 x 220, 84 pages, 46 photographies en couleur, éditions Filigranes, 25 euros.

Http://filigranes.revue.com/


L'exposition « Daniel Challe, Fuga et autres suites » est présentée du 22 mars au 10 mai 2008 au Musée de La Roche-sur-Yon (Rue Jean-Jaurès, 85 000 La Roche-sur-Yon, tél. 02 51 47 48 35, www.ville-larochesuryon.fr ; ouvert du mardi au samedi de 13 h à 18 h), accompagnée d'un Workshop : « Daniel Challe, la caméra-jouet », École d'Art, 14 et 15 mai 2008.


L'exposition « Daniel Challe, Journal d'Espagne et autre journaux», sera présenté dans la même ville à la Médiathèque Benjamin Rabier, du 17 mai au 30 août 2008.

mercredi 2 avril 2008

« Quand le téléphone sonna... »

Photo Yannick Vigouroux,
« Le livre, Caen [Le Chemin Vert], mars 2008 »
(Sténopé numérique / Digital Pinhole)



« Quand le téléphone sonna, j'étais en train de me laver les dents. »

(Antonio Tabucchi, Nocturne indien, 1984)


Dans sa traduction française, p. 52 (éd. 10/18), la phrase apparaît au milieu du récit, alors que chez Raymond Carver, elle constitue l'amorce fondamentale d'une nouvelle, comme il l'a reconnu dans Les Feux, dès les premières lignes :

« Il était en train de passer l'aspirateur lorsque le téléphone sonna.»


Bien sûr, l'action, la proposition sont inversées, mais quels airs (littéraire, en tenant compte du décalage par rapport à la version originale du à la traduction) de ressemblance !

Antonio Tabucchi a-t-il lu Raymond Carver ? (ce que semble confirmer la situation très prosaïque du personnage inconfortablement obligé d'ouvrir ensuite la porte de sa chambre d'hôtel, la brosse à dents entre les dents...).

Le quotidien, dans ce qu'il a de plus banal : voilà justement l'un des sujets de prédilection des adeptes de la Foto Povera.

Et si le monde extérieur n'était qu'une projection mentale ?

Photo Yannick Vigouroux,
« Blue Bob, Caen, mars 2030 »
(sténopé numérique / Digital pinhole)


Cette photo (une capture d'écran TV) est un petit hommage à l'univers cinématographique et à l'album éponyme (2003) de David Lynch...

Et si le monde extérieur n'était qu'une projection mentale ? : je sais que je ne suis pas le premier à formuler cette hypothèse, mais elle mérite le détour.

J'éprouve de plus en plus de difficultés à photographier ce qui m'entoure, et pourtant, curieusement, j'ai l'impression d'avoir de plus en plus d'aisance à écrire et à projeter, au sens figuré mais aussi littéral, ce que je ressens.



Dessin Yannick Vigouroux,
« Blue Self-Portrait, Caen [Chemin Vert],
28 mars 2008 »


Et cela passe de plus ne plus souvent par le dessin ces dernières semaines. Maladroit c'est vrai, souvent, mais plus juste parfois en tant que prolongement de mon cerveau et de mon corps ?...


http://www.davidlynch.com/